Téléphone, ordinateur, Internet: tout devient «sans fil». Mais il reste les câbles des chargeurs de tous ces appareils. On pourrait bientôt en être libérés.
Les applications du système WiTricity de transmission d'électricité sans fil - Source : WiTricity
Certes, on peut estimer que la gène est largement équilibrée par les services considérables apportés par les technologies sans fil. Que serions-nous, que ferions-nous, aujourd'hui, sans notre téléphone mobile, notre ordinateur portable, notre tablette, notre lecteur MP3, notre appareil photo, notre caméscope numérique HD et notre torche à LED ? Néanmoins, trois problèmes majeurs subsistent. D'abord la forêt de câbles incompatible avec un appartement parfaitement rangé, voire volontairement vide, genre loft zen. Ensuite, la multiplication des rayonnements électromagnétiques auxquels les transformateurs participent et qui rendent la vie intolérable aux personnes ultrasensibles à ces ondes invisibles. Enfin, le risque permanent d'oublier de recharger...
L'alarme d'un téléphone déchargé
C'est cette dernière situation qui a conduit un chercheur à s'atteler au problème. En 2007, Marin Soljacic, physicien d'origine croate, raconte ce qui lui est arrivé quelques années auparavant, lorsqu'il s'est retrouvé en pyjamas devant son téléphone sur le plan de travail de la cuisine. « Cela faisait probablement la sixième fois du mois que j’étais réveillé par le signal de mon téléphone me prévenant que j’avais oublié de le charger, raconte-t-il. Il m’est apparu qu’il serait vraiment bien que l’appareil prenne soin lui-même de son chargement ». Lorsque c’est un professeur de physique au MIT qui fait un tel constat, les choses ont plus de chances d’avancer que s’il s’agit de vous ou moi. Pour autant, le problème restait entier: comment transmettre de l’électricité sans fil ?Recharge sans fil de voitures électriques
Même si c’est le téléphone mobile qui est à l’origine de l’idée du physicien, il semble que les premières applications s’orientent plutôt vers l’automobile qui réclament moins de miniaturisation. En 2010, un accord est signé entre WiTtricity et Delphi Automotive pour le développement d’un système de recharge sans fil des véhicules électriques et hybrides. L’année suivante, c’est le géant Toyota, pionnier des voitures hybrides, qui collabore avec WiTricity dans le même domaine, avec un projet de participation à une augmentation de capital de la start up. Toujours en 2011, Thoratec, spécialiste des pacemakers, annonce un projet de système de recharge sans fil de son produit HeartMate II LVAD. Dans la foulée, General Motors, Mitsubishi Motors et Audi s’intéressent à WiTricity que le New York Times classe, en 2012, parmi les 50 entreprises les plus innovantes.La Corée se lance
L’électricité sans fil connaît ainsi un démarrage prometteur. Sans doute en priorité sur des véhicules qui ne posent pas de problème de taille des bobines. Ainsi, le 13 février 2013, l’Institut avancé de science et de technologie de la Corée (KAIST) et l’Institut de recherche sur les chemins de fer de Corée (KRRI) ont-ils annoncé avoir développé un système de transfert sans fil d’électricité adapté au transport par train. En 2011, une démonstration avait déjà été réalisée sur un véhicule électrique baptisée On-line Electric Vehicule (OLEV). Plus fort encore que les systèmes américains, la technologie coréenne permet le rechargement pendant les trajets, les arrêts et le parking. D’où une réduction d’un cinquième de la quantité de batteries nécessaire.Bus, trams, trains à grande vitesse...
Les premiers prototypes, un bus et un tram, ont été équipés d’une puissance de 100 kW alimentés par un rayonnement magnétique à 20 kHz. La transmission d’énergie électrique afficherait un rendement de 85% avec une distance de 20 cm entre le véhicule et la surface de la route. En juillet 2013, un premier véhicule OLEV assurera un trajet de 40 minutes dans chaque sens à l’intérieur de la ville de Gumi. Dong-Ho Cho, directeur du centre pour la technologie de transferts d’électricité sans fil du KAIST estime que l’OLEV peut être utilisé à grande échelle grâce aux progrès réalisés sur la densité de puissance transmise, multipliée par un facteur de plus de trois.Alors que l’on a encore l’impression que le câble électrique n’a aucun souci à se faire pour l’avenir et que certains vont jusqu’à les dérober… sur les voies ferrées, le futur pourrait être bien différent. D’ici quelques années ou décennies, l’acte de brancher un appareil électrique sur une prise pourrait devenir aussi désuet que de téléphoner avec un téléphone fixe.